Eoliennes offshore

LES ENERGIES RENOUVELLABLES OFFSHORE

Le 26 novembre 2009 à Pontorson, nous avons représenté le GRAPE (Groupement Régional des Associations de Protection de l'Environnement) de Basse-Normandie, dont « les Amis d'Hacqueville » est adhérente, à une réunion présidée par les services de l'Etat ainsi que les autorités civiles et militaires, destinée à valider le document d'objectif Natura 2000 Baie du Mont Saint Michel.

Nous avons, après cette réunion, conversé avec le préfet maritime en lui demandant où en était le programme des énergies renouvelables offshore, faisant suite au grenelle de l'environnement et de la mer. Très aimablement, il nous a informés qu'une bonne vingtaine de dossiers d'implantation de parcs éoliens étaient arrivées sur son bureau. Ces demandes sont à l'étude. Il nous précise que sa responsabilité relève de la colonne d'eau allant de la frange littorale du Couesnon à la frontière Belge. Par contre; l'emprise au sol de ces éoliennes relève de l'autorité des préfets des départements concernés (Manche, Calvados, Seine-Maritime, Eure, Somme, Nord et Pas-de-Calais).

En clair, les services de l'Etat sont représentés par huit hauts fonctionnaires.

Cependant, il nous a signalé qu'il a personnellement une préférence pour le projet d'installation d'hydroliennes, notamment dans la zone du Raz-Blanchard. Logiquement, ces implantations devront être situées à proximité d'un R.T.E (Réseau Transport Electricité).

Cette discussion m'a donné l'envie d'en savoir un peu plus sur ces énergies renouvelables ainsi que l'avancée des recherches dans ce domaine. Je vous livre ci-dessous les résultats de mes travaux.

 

LE VENT TOURNE : l'éolien terrestre n'aurait plus le vent en poupe et son avenir serait compromis.

Pourtant le territoire français est favorisé par la présence de vents d'une vitesse supérieure à 27 km/heure dans le Languedoc Roussillon, de 23 à 27 km/heure dans les régions de l'Ouest et du Nord et inférieure à 23km/h sur le reste du territoire. Malgré cet avantage, le parc éolien français ne produit que 1,5% d'électricité contre 8% en Allemagne et 14% en Espagne.

La production d'électricité en France se répartit comme suit :

·         le nucléaire : 80%

·         les centrales thermiques pétrole charbon gaz : 8%

·         l'hydraulique (barrages en montagne, fleuves et la Rance ) : 10%

·         l'éolien : 1,5%

·         reste le photovoltaïque auquel il est promis un bel avenir.

L'objectif : la France s'est fixée le but de produire 23% d'électricité renouvelable en 2020. Tous les arguments en faveur des éoliennes sont réunis, et le grenelle de l'environnement a logiquement programmé une montée en puissance vertigineuse, faisant passer la production de 5 000 Mw[1] à 25000 Mw. Ceci entraînerait l'implantation de 10 000 mâts éoliens (une étude parle de 20 000), au lieu des 2 000 actuellement.

La technologie de l'éolien est au point, cependant de nombreuses interrogations se posent, en premier lieu la constance très aléatoire du vent. Une turbine ne commence à tourner qu'avec un vent soufflant à 10-15 km/h, elle atteint sa puissance maximale à 40-45 km/h et s'arrête au-delà de 90 km/h pour épargner sa structure.

La conséquence qui en découle est que l'éolien ne fournit que 20% de sa puissance théorique. Une turbine vendue pour une puissance de 500Kwh ne produit en moyenne que 100Kwh.

Ce mode de production d'électricité serait incompatible avec la demande des consommateurs. En effet, les pics de production se situent généralement les mois de janvier et février avec des consommations voisinant les 90000 Mw, alors que l'éolien plafonne à 1500 Mw pour redescendre faute de vent à une production quasiment nulle. Durant cette période de grand froid, le passage d'un anticyclone génère peu de vent et, de ce fait, l'éolien ne peut répondre à une forte demande des consommateurs utilisant le chauffage électrique. En hiver, une simple chute de température de 1 degré génère un besoin de 2100 Mw de puissance, l'urgence revient donc aux centrales capables de fournir la puissance nécessaire.

 

PAS SI ECOLOGIQUE QUE CA

Les parcs éoliens d'Europe du Nord, auxquels on fait référence, ne font pas face à la demande d'électricité des usagers domestiques et industriels. Notamment l'Allemagne est obligée d'utiliser ses centrales au gaz, pétrole et charbon et devient, par conséquent, la championne d'Europe de production de Co2, qui génère un effet de serre. Il ne faut pas écarter le fait que la fabrication des éoliennes et leur installation demandent des dépenses énergétiques considérables.

Les champs d'éoliennes, de véritables sites industriels, nécessitent d'importants travaux et génèrent des nuisances indiscutables, aussi bien visuelles que sonores. Dans notre département, à titre d'exemple, une éolienne se trouve dans la perspective de la cathédrale de Coutances, et ce n'est pas un cas isolé sur notre territoire national.

Actuellement de nombreux scientifiques et associations s'opposent à l'implantation de ces sites industriels, évoquant un rendement insuffisant et des nuisances induites.

L'avenir des parcs éoliens à terre semblant compromis, il reste encore l'espoir d'installer 23 sites éoliens industriels offshore voisinant le littoral de l'ouest du Cotentin à la baie de Somme ; ce serait le pari engagé par le ministère de l'environnement. Avec un vent plus régulier, la rentabilité serait supérieure aux éoliennes terrestres.

Sur ces 23 sites, un parc éolien, envisagé au large de la Pointe du Grouin et Chausey, serait déplacé en baie de Saint-Brieuc (il s'agirait de 45 mâts). En Normandie, 21 éoliennes sont prévues au large de Veulette s/mer (Seine Maritime). En projet également 250Mw et 300Mw au large de la Côte de Nacre et de Fécamp, ce qui représenterait l'implantation de 110 mâts. Il ne s'agit que de 3 sites. Reste à situer les 20 autres prévus par le gouvernement.

Projet de parcs éoliens


Ci-dessus, la simulation cartographique de « Basse-Normandie Environnement » pourrait présager ce à quoi pourraient ressembler nos côtes dans quelques années.

Il faudra tenir compte du trafic maritime, l'un des plus importants de la planète, et des zones très sensibles de pêche professionnelle. Reste une possibilité : l'implantation de parcs hydroliens.

 

LE GRENELLE DE LA MER, L 'ENERGIE BLEUE

Un plan d'urgence a été décidé pour doter la France de dispositifs de production d'énergie renouvelable trouvant leur source dans la grande bleue. Ce programme ambitieux est censé assurer la fourniture de 6000Mw à l'horizon 2020.

Contrairement à l'éolien, utiliser les forces naturelles de la mer (phénomène des marées, les courants, les vagues et même la houle) permet de produire une énergie régulière : c'est l'énergie hydrolienne.

Utiliser la force de la mer n'est pas nouveau ; l'usine marémotrice de la Rance unique au monde, construite et raccordée au réseau EDF fin 1967, alimente à elle seule la ville de Rennes et son agglomération. Pour des raisons écologiques le principe d'usine marémotrice n'a pas été renouvelé, et de ce fait le projet de barrage Cancale – Chausey - Granville a été abandonné dans les années 1970.

Le principe est simple : la force des courants marins actionne les pâles et les hélices qui font tourner les turbines convertissant cette énergie en électricité. L'électricité est transportée par câble jusqu'au réseau EDF.

Fonctionnement d'une hydrolienne par Ouest-France


Il existe trois zones possibles d'installation des hydroliennes :

·         Hauturière :pour l'exploitation des courants de haute de mer dont les puissances sont supérieures à plusieurs dizaines de Méga Watts (Gulf Stream).

·         Côtière :utilisant les courants de marées : puissance estimée à plusieurs Méga Watts.

·         Fluviale : la ressource est l'énergie des eaux de ruissellement. La puissance est au maximum de quelques centaines de KW.

Notre pays n'est guère en avance et c'est en Grande-Bretagne que depuis plusieurs années sont développés de nombreux projets. En effet, 7 prototypes de conception différente y sont actuellement en service :

 

 

Utilisation des courants:

Le SEAFLOW : (en photo ci-contre) la société anglaise MCT, soutenue par EDF a testé en 2003 une machine à hélice réversible (pouvant fonctionner en flot comme en jusant) qui a donné toute satisfaction. Une hydrolienne de 2ème génération : SeaGen a été installée en 2008 en Irlande du Nord : elle peut être remontée en surface en cas de besoin. Cette hydrolienne, en période de pointe, tiendrait une production de 1,2 Mw (l'équivalent d'une grosse éolienne).

La société MCT (filiale EDF) envisage d'exploiter une ferme de 7 unités au large du Pays de Galles ayant comme objectif une production de 10Mw.

Le TIDEL : (en photo ci-contre) développé par une société écossaise. Cette hydrolienne possède des hélices flottant entre deux eaux et maintenues en place par des chaînes reliées à un ancrage sur le fond. D'une conception assez simple, facile à démonter et à déplacer, elle s'oriente dans le sens du courant. Les essais effectués en 2004 ont été satisfaisants.

La prochaine étape consistera en une machine à l'échelle 1, dotée d'hélices tripales et de deux générateurs fournissant une puissance de 1Mw.

Utilisation de la houle:

Le WAVE DRAGON : plate forme flottante en forme d'atoll, ancrée au large à une hauteur légèrement supérieure au niveau de la mer. Du fait du déferlement de la houle (1), l'eau s'accumule dans un grand réservoir (2) et s'évacue par le centre en actionnant une turbine (3) qui produit de l'électricité.

Des essais sur maquette ayant donné satisfaction, la société Danoise Wave Dragon a signé un accord en 2007 avec le Pays de Galles pour installer au large des côtes du Pembrokeshire, une unité de production grandeur nature de 7Mw. Son objectif est l'installation de 5 unités/an.

Le LIMPET : la société écossaise Wavegen s'inspire du phénomène des trous souffleurs : le mouvement des vagues provoque une compression de l'air qui s'échappe violemment, en provoquant des jets d'embruns.

La centrale LIMPET se compose d'une enceinte en béton dont la base, immergée et en communication avec la mer (1) emprisonne une masse d'eau dont le niveau monte et descend avec le mouvement de la houle (2). L'air expulsé ou aspiré dans l'enceinte actionne une turbine (3) qui produit de l'électricité.

Par la suite, cette société envisage une unité de 40 turbines soit une puissance de 4Mw.


Le PELAMIS : développé par la société écossaise Pélamis Wave Power utilise également le mouvement de la houle. Il est constitué de 4 cylindres reliés par des articulations et équipés de ballasts pour obtenir une semi-émersion. L'ondulation du système (1) (2) provoquée par le passage des vagues (4), fait bouger les articulations qui agissent sur des vérins actionnant Zone de Texte: Schéma du Pélamisun moteur hydraulique. Celui-ci est relié à un générateur produisant de l'électricité. La machine est fixée au sol (3) par un ancrage spécial et l'électricité produite est envoyée à terre par un câble ombilical.

Expérimenté en taille réelle aux îles Orcades en 2003, ses concepteurs prévoient l'installation de 30 ou 40 unités. La puissance générée (30Mw) correspondra aux besoins de 20 000 foyers.

 

L'ARCHIMEDE WAVE SPRING (AWS)

Machine composée d'un cylindre, immergée à quelques mètres au dessous de la mer, dont la coupelle supérieure (1) coulisse le long de la paroi sous l'effet de la houle. L'air emprisonné dans le cylindre par compression et décompression, actionne par ce va-et-vient un générateur (2) qui produit de l'électricité.

 

Schéma AWS ci-dessus

Ferme de 2ème génération AWS

ci-dessus

Ce prototype est en cours d'amélioration. Dans le futur, la société Océan Energy prévoit le déploiement de ses AWS. Une zone littorale de 3 nautiques sur 0,2 équipée de ses machines pourrait produire 50Mw, fournissant l'électricité à 25 000 foyers.

Utilisation de l'énergie thermique:

- L'ETM (énergie thermique des mers)

Le principe consiste à utiliser la différence de température entre l'eau profonde et l'eau de surface pour actionner une turbine ; des essais sont en cours.


ET LE LITTORAL FRANÇAIS : La France à la remorque...

Carte des différentes zones probables d'implantation


Au large de Brest et de Cherbourg, la vitesse des courants d'une moyenne de 12 km/h pourrait fournir une puissance de 3 Giga Watts, soit grosso modo, l'équivalent de 3 réacteurs nucléaires. Des pointes de 6 Gw seraient possibles pendant les périodes de vive eau, chiffre avancé par la société Hydrohélix précurseur de l'hydrolien en France.

Cette société, créée en 2000, proposerait deux cordons de 21 km équipés de turbines à la pointe Finistère et au Nord Cotentin. Faute de subventions, ce projet dort dans les cartons.

Pourtant le littoral Normand et Breton est parcouru par des marées puissantes et régulières. Contrairement à l'énergie éolienne, l'énergie produite par les hydroliennes peut être planifiée. Ces éoliennes sous marines sont attractives pour plusieurs raisons :

·         d'une part, la production d'électricité est prévisible puisque les marées sont calculées à l'avance.

·         par ailleurs, l'espace nécessaire pour ces installations et l'impact sur l'environnement sont réduits. Enfin, les courants marins constituent une ressource énergétique intéressante et inépuisable (1000 fois supérieure à celle de l'air).

La consommation instantanée d'électricité en France se situe aux alentours de 50Gw ; les courants marins pourraient donc fournir entre 6 et 12% de l'électricité à la France. Il faudrait installer 4500 hydroliennes au fond des mers pour obtenir un tel résultat : c'est le programme proposé par la société Hydrohélix (photo ci-contre). Ces cordons d'hydroliennes implantées à 25 mètres de profondeur et à proximité des côtes ne peuvent entraver la navigation et la pêche professionnelle.

Actuellement, depuis 2008, une hydrolienne est en service à titre d'essai à Bénodet, et en 2011, EDF va entreprendre la construction d'une ferme de 3 à 6 hydroliennes au large des côtes d'Armor d'une capacité de 4 à 6 Mw. D'ici quelques années, des prototypes seront immergés dans la Manche et des champs d'hydroliennes pourraient fleurir à proximité de nos côtes de la Bretagne et du Cotentin. C'est dans la Manche, en effet, que se concentre l'essentiel du potentiel de cette énergie.

Le sujet est vaste et en constante évolution.

L'éolien ou l'hydrolien ne peuvent pour l'instant pas satisfaire la consommation d'électricité et les centrales thermiques et nucléaires sont actuellement incontournables.

Différents projets voient le jour :

·         Une centrale photovoltaïque de plusieurs hectares dans le désert saharien : programme européen qui serait dirigé par l'Allemagne.

·         Une station spatiale équipée de photovoltaïque dont l'électricité serait transmise jusqu'à la terre par micro ondes. Ce programme, à ce jour, sommeille dans les cartons.

·         L'énergie du futur serait l'hydrogène, quasiment inépuisable. Sous forme liquide, il devrait alimenter nos véhicules. Un complexe industriel est en cours de construction dans les Bouches du Rhône : ITER qui a pour but la fusion de l'hydrogène (réplique miniature de la fusion-nucléaire du soleil). Cette énergie ne générerait que très peu de déchets et devrait, dans quelques décades, remplacer les centrales thermiques et nucléaires.

Les différents projets existants d'énergies renouvelables ont du mal à se mettre en place et rencontrent des oppositions. On voit les levées de bouclier de certains contre les éoliennes. L'énergie nous est indispensable et les chercheurs s'évertuent à la rendre de plus en plus accessible et propre.

Les hydroliennes sont-elles la solution ou l'une d'entre elles pour parvenir à l'objectif gouvernemental de 23% en 2020 ? L'avenir nous le dira...

Yves METRAL.

Sources:

·         Science et Vie septembre 2010

·         Sillages n°217

·         Internet

 

  Pour compléter la recherche intéressante d’ Yves Metral, voici quelques tableaux

 

                                             Un  comparatif avec l’EPR de Flamanville

 

                              EPR                    éolienne          éolien offshore           hydrolienne       photovoltaique

Puissance          1 700 MW             3 MW (réel:0,6)   5 MW (réel:1,7)      1,5 MW          1,5 MW pour 1 Ha   

Coût   /MVH         100 € ( ??)               80 €                   150 €                    150 €                  100 à 300 €

                           (production)             (rachat)                 (rachat)                (rachat)                 (rachat)

                        5 Millions d’€/ MW ??

 

Donc      1 EPR = 1200  hydroliennes ou éoliennes offshore

L’éolien offshore a un prix de revient deux fois supérieur au terrestre

 

Pour mémoire, le barrage de la Rance =240 MW (24 turbines de 10 MW)= 160 hydroliennes  ou éoliennes offshore (alimentation d’une ville comme Rennes  soit près de 200 000 hab mais seulement 4% de la consommation bretonne )

Puissance maximale d'une centrale électrique moyenne en fonction de l'énergie d'origine

Centrale

Puissance (MW)

Barrage hydraulique

2000

Tranche de centrale nucléaire

1500

Ferme de 100 grosses éoliennes

500

Centrale thermique

500

Solaire photovoltaïque (10 hectares)

15

 

 

Investissement des 103 milliards d’€  cités dans le tableau   =>

 

- 4 réacteurs EPR de 5800 MW                  produisant 40 TWh et……  2400 emplois

-  parc de 1700 éoliennes de 17 000 MW          ……   50 TWh et…….5800 emplois

             

                Soit 1 MW= 18 millions d’€ pour le nucléaire et 6 millions d’€ pour les éoliennes 

 

Alors quand Areva annonce 5 millions pour l’EPR de Flamanville, de qui se moque-t-on ?

                                                                                                                               

 

                                                                                                                             Serge Monrocq

 



[1] Mw : Mégawatt